Laura, future maman, parle de son appréhension : « Depuis ma grossesse, je suis sceptique à utiliser les signes avec mon bébé, j’ai peur que cela l’empêche de parler. Dernièrement, j’ai vu une émission télévisée qui parlait des avantages à signer. J’ai aussi une amie qui pratique les signes avec son bébé de 12 mois et qui trouve cela formidable alors je suis un peu perdue. »
Qu’apporte la pratique des signes avec son bébé ?
Est-ce indispensable ? Qu’est-ce que le langage signé bébé ?
Le langage signé bébé est un ensemble de gestes simples réalisés avec les mains appelés « signes ». Ils se concentrent sur le vocabulaire du quotidien. Ces signes sont issus et adaptés de la Langue des Signes Française LSF, utilisée par et pour les personnes sourdes et malentendantes.
La LSF est une langue à part entière reconnue dans le monde, elle comporte une syntaxe différente du français. En revanche, le langage signé bébé reste simplement un code gestuel et un moyen de communiquer avec son bébé. Cette communication gestuelle codifiée est utilisée par l’adulte en plus de la parole. L’association des signes à la parole est fondamentale. Il est habituel de signer un seul ou deux éléments tout au plus dans toute une phrase. Dans la phrase : « Veux-tu boire? », l’adulte signera « tu » et « boire ».
D’abord, l’adulte signe pour que l’enfant comprenne. Dans un second temps, ce dernier pourra éventuellement répondre ou s’exprimer grâce aux signes. Ce mode de communication est bien sûr passager puisque lorsque l’enfant saura parler, il abandonnera les signes pour s’exprimer oralement. Le langage oral est plus riche et spontané.
Intérêts du langage signé avec le bébé et l’enfant ayant un trouble du langage
Le langage signé est utilisé par les orthophonistes et autres professionnels en contact avec des enfants porteurs de handicap ou ayant des troubles sévères du langage.
Ils permettent de soutenir et d’augmenter la communication par un autre canal que le langage parlé. Il s’agit d’une aide à la compréhension des mots car en plus du mot entendu « gâteau », l’enfant peut voir le signe « gâteau » dans sa forme visuelle.
Chez les enfants qui ne peuvent s’exprimer par oral, les signes sont même parfois utilisés pour remplacer la parole. Ils peuvent également être associés à d’autres outils tels que des pictogrammes dans un classeur de communication. Grâce au langage signé, l’enfant handicapé peut exprimer des besoins, des désirs ou des idées. Cela nécessite bien sûr d’apprendre au préalable un répertoire de signes équivalant au vocabulaire d’un enfant. C’est le plus souvent l’orthophoniste qui accompagne l’enfant dans l’apprentissage des signes en partenariat avec les parents.
L’enfant commencera par voir et comprendre en associant des objets ou des situations sur des signes de façon répétée (« gâteau », « chien », « joyeux ») puis il pourra les exprimer à son tour lorsqu’il les maîtrisera comme l’apprentissage du langage oral finalement !
En cas de lésion neurologique de l’aire cérébrale du langage, les neurosciences expliquent le rôle renforçant de la communication par les signes. Si l’on regarde l’organisation du cerveau, l’aire motrice est voisine de l’aire de la parole et une stimulation d’un côté pourrait bien avoir des répercussions positives de l’autre. Dans cette optique, utiliser les signes peut avoir un effet bénéfique sur les capacités à parler et augmente les chances d’oraliser chez l’enfant handicapé.
Pour l’enfant sans difficulté
Le bébé au développement normal parlera, son cerveau est équipé pour ça. Il est neurologiquement prêt pour développer son langage et sa parole après ses 12 mois à condition qu’il évolue dans un contexte bienveillant et stimulant sur le plan du langage.
Alors pourquoi utiliser les signes avec l’enfant sans difficulté ? Outre l’effet de mode, le langage signé bébé est riche de sens pour le tout-petit qui construit son langage.
Il permet d’offrir un surplus d’informations et augmente la compréhension du langage oral chez le bébé. Le langage signé bébé capte l’attention du bébé par les gestes qui accrochent et maintiennent le regard de l’enfant. Dans l’interaction adulte-enfant, faire des signes permet d’engager l’attention des deux interlocuteurs dans l’échange.
Avec les signes, l’adulte se met à hauteur et au rythme de l’enfant. La proximité directe, le regard de l’adulte soutiennent l’interaction et l’engagement du bébé. Par ailleurs, le bébé a besoin de temps pour traiter les informations qui lui parviennent. Depuis sa naissance, son cerveau fonctionne à plein régime mais les connexions cérébrales et l’influx nerveux mettent plus de temps à s’établir que dans le cerveau adulte. Ce délai supplémentaire n’est pas toujours respecté par le langage parlé. Ainsi, le langage signé bébé nous amène à ralentir le débit de notre parole, à répéter un même mot et son signe ce qui équivaut à se mettre au tempo du bébé.
Les signes sont aussi l’occasion de moduler notre parole, élément très important pour l’oreille du bébé. Ils nous invitent aussi à théâtraliser davantage, à exagérer les mimiques du visage et donc notre expressivité auprès du bébé ! Prenons un exemple : « Ta purée est chaude ». Dans cette phrase, le signe utilisé est « chaud », il ne sera pas dit et signé de la même façon si la purée est tiède (voix douce, posée et petit geste) ou si elle est brûlante (voix grave, forte et geste ample).
L’adulte signeur doit prêter une attention plus grande à ce qu’il dit/signe et aux réactions du bébé en retour, guettant ses réponses orales ou signées, observant s’il reproduit les signes ou s’il sourit.
Ce mode de communication par les signes est de plus en plus répandu dans certains modes de garde. Les professionnels exerçant en crèche ou les assistantes maternelles se forment à la pratique des signes. Cela permet de booster les interactions et favorise la relation individuelle dans le collectif.
Abracadabra Signes ?
Bien qu’apportant de nombreux bénéfices dans la communication avec son bébé, les signes ne sont pas magiques alors que peut-on attendre du bébé bercé aux signes ?
Dans sa première année de vie, le bébé se prépare à parler mais n’est pas encore en capacité de le faire: il s’agit de la période pré-verbale qui fait partie du développement de tous les bébés. Ils ne peuvent pas prononcer de mots ni même exécuter des signes dans le but de communiquer. Les bébés observent, ressentent, enregistrent: ils s’imprègnent de leur environnement. Leurs sens sont en éveil. Ils s’expriment par des pleurs, des rires, du babillage voire des gestes mais l’accès aux signes n’est pas encore possible. Pour signer, l’enfant doit avoir un développement cérébral suffisant, reflet des capacités intellectuelles qui progressent pour entrer dans les symboles comme les mots, les signes ou toute forme de langage codé.
Comprendre son enfant au plus tôt est un souhait partagé par tous les parents. Lorsque le bébé vient au monde, ses besoins sont multiples et permanents, les tempêtes émotionnelles qu’il traverse sont intenses et parfois difficiles à décrypter pour les parents. Il n’existe pas de “dictionnaire bébé” à ce jour et les signes ont leurs limites également. L’enfant ne peut pas produire une demande avant d’en avoir l’âge par la parole ou par les signes.
Cette première année de vie où l’enfant ne peut pas significativement exprimer ce qu’il veut est l’occasion d’apprendre des mots par la verbalisation et/ou la pratique des signes par le parent.
Au cours de la 2 ème année, la maîtrise des gestes est effective avant celle de la parole. Cela permettrait aux petits de s’exprimer plus facilement par les gestes, diminuant ainsi les frustrations et les incompréhensions adulte-enfant.
Le langage signé bébé n’a aucune raison de retarder l’apparition du langage chez votre enfant, au contraire. La pratique des signes est une plus-value apportée aux échanges et offre un moyen de communication gestuelle, le temps que le bébé ne sache parler pour de bon.
Chez le bébé sans difficulté, les signes ne se substituent pas à la parole mais viennent en complément et dans la période pré-verbale seulement. En revanche, pour les enfants ayant des troubles sévères du langage, les signes peuvent perdurer pour soutenir le langage que ce soit pour aider à la compréhension ou pour remplacer la parole.