Et si c’était un trouble de l’oralité alimentaire ?
Le trouble de l’oralité alimentaire (aussi appelé trouble alimentaire pédiatrique) peut être défini comme un trouble développemental des fonctions orales alimentaires. C’est à dire que votre enfant a des difficultés à passer une ou plusieurs étapes alimentaires (passage au biberon, passage à la cuillère, passage aux morceaux).
Ces difficultés doivent persister depuis plus de 2 semaines (ce n’est pas juste de temps en temps), et peuvent s’accompagner de difficultés pour toucher les matières ou les aliments, les sentir, goûter… (troubles sensoriels) et/ou de difficultés de succion, de mastication (les mouvements sont difficiles à réaliser). On parle alors de difficultés oro-motrices.
Ce trouble alimentaire pédiatrique peut entraîner des répercussions sur le développement psychomoteur (l’enfant qui n’aime pas toucher les différentes matières avec ses mains n’appréciera certainement pas de faire du 4 pattes par exemple), langagier (on utilise la bouche pour manger et pour parler), psychoaffectif (ce n’est pas facile pour bébé de ne pas pouvoir manger comme les autres, le moment de repas est devenu difficile à supporter pour l’enfant).
Comment savoir si mon enfant présente un trouble de l’oralité alimentaire ?
Voici quelques signes qui peuvent vous « mettre la puce à l’oreille » :
- Les étapes alimentaires et transitions sont difficiles à passer : passage du sein au biberon, du biberon à la cuillère, passage aux morceaux…
- Les aliments à la cuillère sont difficiles à accepter par l’enfant (et persiste au-delà de 8 mois)
- L’enfant n’accepte que des textures lisses (encore après 16 mois)
- Fréquents haut-le-cœur, vomissements
- L’enfant consomme moins de 20 aliments à 18 mois
- Aucun plaisir à s’alimenter
- Temps de repas long (supérieur à 30 min)
- L’enfant stocke la nourriture longtemps dans la bouche sans l’avaler
- L’enfant sélectionne son alimentation en fonction de la texture, du goût, de la couleur, de la température…
- Le repas est devenu un moment de conflit et de négociations permanentes
Si vous avez un doute, parlez-en à votre médecin. Il pourra vous prescrire un bilan orthophonique des troubles de l’oralité alimentaire.
En attendant, comment aider mon enfant ?
Certains enfants sont « hyper réactifs » aux odeurs, au toucher, aux bruits etc. Cela signifie qu’ils réagissent de façon plus intense à une stimulation sensorielle qui ne pose pas de difficulté aux autres. Le temps de repas est un moment multisensoriel : lorsqu’on mange, on regarde, on sent, on touche (si on cuisine par ex), on goûte… Quand un enfant présente une hyper-réactivité sensorielle, les temps de repas sont particulièrement difficiles.
Cette hyper réactivité sensorielle peut se traduire par :
- Des défenses visuelles au moment du repas (se détourne, évite de regarder, fuit…)
- Des défenses comportementales (s’agite…)
- Des défenses olfactives (dégoût à l’odeur, se bouche le nez…)
- Des défenses tactiles (refus de toucher ou d’être touché, besoin de s’essuyer les mains fréquemment…)
- Des défenses orales (ferme la bouche, ouvre la bouche en mettant la langue au palais, a des nausées, des vomissements…)
Pour prévenir et limiter cette hyper-réactivité sensorielle, vous pouvez, dès le plus jeune âge, proposer à votre enfant des petites brosses à dents sensorielles (que l’on trouve au supermarché ou en pharmacie) afin qu’il prenne l’habitude de « jouer » avec sa bouche, d’avoir des sensations dans sa bouche et d’y prendre plaisir.
S’il refuse de manger à la cuillère : l’enfant va apprendre à gérer de nouveaux goûts, de nouvelles textures, un visuel différent, un nouvel outil (la cuillère)… Un vrai chamboulement pour lui ! Laissez-lui le temps de s’habituer et de découvrir la cuillère à d’autres moments, en le laissant la toucher, jouer avec… vous pouvez aussi lui laisser toucher ce qu’il va manger, il ne connaît pas, ça l’intrigue sûrement beaucoup !
S’il semble avoir des difficultés à toucher certaines textures, certains aliments : alors vous allez lui proposer plein de choses à toucher, différentes les unes des autres et le laisser manipuler, découvrir…en prenant son temps. N’hésitez pas à le faire participer à la préparation du repas : il peut vous regarder, toucher une carotte par exemple et pourquoi pas mélanger, écraser quand il est un peu plus grand ? Tout ça pour le familiariser avec les aliments, leur texture, leur odeur…
S’il refuse les morceaux : de la même manière, proposez-lui de toucher, proposez-lui de petits morceaux tendres que vous placez entre ses molaires (sur le côté dans sa bouche) dans un premier temps, ça lui soulagera un peu le travail de sa langue !
Pour résumer :
- Veiller à son installation sur les temps de repas (pieds au sol, appui du dos, hauteur de table adaptée à sa taille avec les coudes en appui sur la table qui ne doit pas être trop haute)
- Proposer des petites brosses à dents, hochets de dentition à porter en bouche…il est donc important d’encourager cette découverte du monde par la bouche (attention toutefois à ne pas laisser tout mettre en bouche, ce qui peut s’avérer dangereux et non hygiénique !)
- Au cours du repas: proposition de morceaux croustillants/fondants sur les molaires de l’enfant
- Lui permettre de toucher les aliments, de les sentir, de goûter puis de recracher si besoin
- Encourager sans forcer les activités manuelles (collage, pâte à modeler…)
- Lui proposer de participer aux temps de repas en :
- Mettant la table (rituel du temps de repas)
- Cuisinant avec papa ou maman (en fonction de son âge)
- Restant à table sur toute la durée du repas (20 min)
Et n’oubliez pas : « Une dent, une brosse à dent » ! Cela permet dès le plus jeune âge de familiariser l’enfant avec le brossage de dents et d’accepter des petites choses dans sa bouche.
Quand consulter un orthophoniste ?
Tout d’abord, faites-vous confiance et accompagnez votre enfant sur les temps de repas en veillant à ce qui a été cité plus haut.
Toutefois, si le temps de repas est devenu une réelle source d’angoisse, tant pour vous que pour votre enfant, et que vous ne savez plus comment l’aider, vous pouvez demander à votre médecin des conseils et, s’il le juge nécessaire, il vous orientera vers un orthophoniste. Pas d’inquiétude, parfois quelques séances suffisent !