Un biscuit qui passe de travers
La dernière fois que Laurence est allée voir sa tante à la maison de retraite, elle lui a apporté des gâteaux secs.
La vieille dame était ravie de sa visite ! Mais, alors qu’elle dégustait les biscuits tout en discutant avec sa nièce, elle s’est mise à tousser très fort. Laurence a pris peur et a appelé une aide-soignante à l’aide. Sa tante n’arrivait plus à respirer correctement. L’aide-soignante a demandé à la vieille dame de tousser le plus fort possible. Après quelques secondes d’angoisse, celle-ci a fini par reprendre son souffle, au grand soulagement de Laurence.
L’aide-soignante lui a alors expliquée que sa tante venait de faire une «fausse-route». Un orthophoniste lui a rendu visite lors d’un repas et il lui a donné des conseils. Il lui a notamment préconisé d’éviter certains aliments qui lui posent souvent problème.
Laurence se demande quels sont ces aliments et quel est le rôle de l’orthophoniste dans cette histoire.
Le vieillissement, un processus naturel
Quand on avance en âge, on change sur plein de niveaux. C’est un processus naturel et normal : on parle de vieillissement pour le décrire. Nous nous attendons à ce que le visage d’une personne âgée ne soit pas le même que celui qu’elle avait à vingt ans. Ces changements sont ordinaires et nous concernent tous.
Vieillir implique un affaiblissement physique : on perd de la force, les mouvements sont plus lents. Les perceptions changent aussi : on voit moins bien et on entend moins bien. On parle de presbytie et de presbyacousie. Même nos goûts se modifient : on a moins facilement soif ou faim, on apprécie les aliments au goût plus prononcé.
Ces changements peuvent avoir un impact sur la manière dont on mange, sur nos capacités à avaler (boisson et nourriture). Le vieillissement diminue la force musculaire et la finesse des perceptions alors qu’elles jouent un rôle essentiel dans la prise de nourriture et de boisson. On parle de presbyphagie.
S’adapter aux changements
Les personnes âgées se rendent souvent compte des modifications qui surviennent dans leur vie. Elles s’y adaptent peu à peu, lorsque leurs capacités le leur permettent.
Concernant la nourriture, si elles se sentent en difficulté pour mâcher de la viande dure par exemple, elles éviteront d’en manger. Elles n’achèteront chez le boucher que des morceaux tendres.
S’adapter est parfois plus difficile lorsqu’on vit en collectivité, quand les repas sont les mêmes pour tous.
Certaines maladies ou d’autres facteurs (prise de médicaments, dénutrition) interviennent aussi. Ils diminuent les capacités des personnes âgées à avaler et à s’adapter à leurs difficultés. On parle alors de troubles de la déglutition. Il convient de rester vigilant à ces situations.
En cas de questionnement, le médecin fait appel à un orthophoniste pour réaliser un bilan de la déglutition.
Les aliments à risque augmenté
Pour manger, on utilise ses muscles : pour couper, saisir, mâcher et avaler. On utilise aussi ses sensations : la vue, le goût, l’odorat, les sensations tactiles et de température à l’intérieur de la bouche. Lorsque certains de ces mécanismes ne sont pas assez efficaces, il peut se produire une « fausse-route » : ce qu’on avale se dirige vers les poumons au lieu de l’estomac. C’est ce qui a fait tousser la tante de Laurence.
Les signes de fausse route (sur des liquides ou des solides) :
– la toux soudaine
– les raclements de gorge
– la voix « mouillée »
On sait que certains aliments augmentent les risques d’avoir des difficultés à avaler. Ils sont :
– filandreux
– trop secs
– s’émiettent
– mélangent liquide et solide
– font des grains, des petits morceaux
Dans le cas de la tante de Laurence, celle-ci s’est plainte de difficultés lors des repas collectifs à son médecin. Ce dernier a alors rédigé une ordonnance pour un bilan orthophonique. L’orthophoniste a assisté à un repas, a questionné la vieille dame sur ses habitudes, ses préférences, les évolutions qu’elle a remarquées récemment. Elle a ensuite effectué un bilan des fonctions oro-myo-faciales.
En fonction de ce qu’il a constaté, l’orthophoniste lui a conseillé d’éviter les aliments à risque, ce que la vieille dame faisait déjà en partie. L’orthophoniste a aussi fait part de ses observations aux équipes soignantes de l’EHPAD et au médecin.
Ajuster son comportement
Une autre raison à la fausse route apparaît dans le témoignage de Laurence : sa tante discutait tout en mangeant ses gâteaux secs. Cela a pu favoriser la survenue de la fausse route.
L’orthophoniste a un rôle de conseil et peut donner des astuces pour éviter les situations délicates. Même si ces ajustements sont évidents, il est parfois utile de les rappeler :
– ne pas parler avec de la nourriture dans la bouche
– manger en étant bien assis
– prendre son temps
– avaler plusieurs fois
– avoir une bouche propre
– si on porte un dentier, que celui-ci soit bien adapté
– rester le plus dynamique possible
Vieillir, changer, cela fait partie de la vie. À chaque âge ses adaptations.
Il est normal de perdre de la force, d’avoir des mouvements plus lents, des sensations qui diminuent avec l’âge. En être conscient permet de s’ajuster. Cela devient essentiel, notamment si la prise de certains types d’aliments devient plus difficile.
Les proches, le personnel soignant autant que les personnes âgées elles-mêmes sont impliqués dans cette démarche. L’objectif est de maintenir le plus possible l’autonomie et les capacités présentes dans de bonnes conditions. Une intervention orthophonique n’est pas forcément nécessaire.