«Mon voisin Antoine, âgé de 47 ans, vient de rentrer de l’hôpital. Il a été hospitalisé pour un accident vasculaire cérébral dû à son hypertension. Il s’en sort bien mais depuis, il a du mal à articuler correctement. À l’hôpital, il a vu une orthophoniste qui a diagnostiqué une dysarthrie. Il doit continuer les séances maintenant qu’il a pu rentrer chez lui. J’aimerais mieux comprendre ce qui lui arrive et comment je peux l’aider ?».
Qu’est-ce que la dysarthrie ?
Le mot «dysarthrie» décrit l’ensemble des troubles de l’articulation qui résultent :
- d’une atteinte du cerveau (c’est-à-dire du système nerveux central)
- d’une atteinte des nerfs venant du cerveau vers les muscles (du système nerveux périphérique)
- ou d’une atteinte des muscles de la langue, des joues ou de la gorge qui permettent d’articuler.
Les mouvements de ces muscles permettent d’articuler les sons du français. Dans les cas de dysarthrie, cette articulation est rendue difficile. Les personnes atteintes peuvent avoir des difficultés à respirer, à articuler et à moduler leur voix. Leur parole peut être lente et monotone. La dysarthrie peut atteindre les enfants comme les adultes.
Comment ça se manifeste ?
La dysarthrie peut apparaître de façon plus ou moins importante.
Parfois, la personne a simplement du mal à articuler un seul son ou groupe de sons (les S et les CH par exemple) et à bien placer sa langue.
Parfois la personne a surtout des difficultés à articuler plusieurs sons qui se suivent de façon rapide. Des mots compliqués comme «instructeur» nécessitent que la langue et la bouche s’organisent rapidement et de façon bien coordonnée pour prononcer les groupes de sons. En cas de dysarthrie, cette rapidité et la précision d’exécution sont souvent difficiles.
Dans des cas très sévères, la parole est tellement floue qu’il devient très difficile pour un interlocuteur de comprendre ce que dit la personne dysarthrique. La voix peut être un peu changée également, et au téléphone bien souvent c’est encore plus difficile. La famille ne reconnaît pas la façon de parler habituelle de la personne, qui a un ton souvent monotone et inexpressif.
Pour Antoine, cela est très frustrant parce qu’il comprend bien, il sait parfaitement ce qu’il a envie de dire, mais il n’est pas compris et sa façon de parler est bien différente maintenant.
Dans tous les cas, la personne doit fournir des efforts pour être comprise et cela peut être très fatigant de se surveiller et d’articuler plus fort.
Lorsque les troubles de l’articulation sont associés à des troubles du langage et de la communication chez l’enfant ou chez l’adulte, on parle plutôt de troubles arthriques que de dysarthrie.
En résumé, la dysarthrie résulte de perturbations neuromusculaires lors de l’exécution des mouvements nécessaires à la parole. Elle affecte la vitesse, la force et la précision des mouvements. Le résultat est le plus souvent une parole ralentie, une mauvaise articulation, une voix faible.
Quelles maladies peuvent déclencher une dysarthrie ?
Il s’agit principalement des pathologies qui créent des difficultés de commande des mouvements et du contrôle des muscles de la parole.
Ce contrôle peut être déficitaire depuis le cerveau qui prévoit, organise et commande les mouvements (atteinte centrale). Les maladies neurologiques comme l’accident vasculaire cérébral, un traumatisme crânien dans les suites d’un accident de la voie publique, l’infirmité motrice cérébrale, peuvent endommager une partie du cerveau responsable de ces mouvements. Dans ces cas, la parole est parfois hachée, hésitante (on dit «scandée»). Dans les cas d’AVC, il arrive que la dysarthrie disparaisse relativement rapidement et que le patient retrouve une parole qui lui convient.
Des maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson, la sclérose latérale amyotrophique, la sclérose en plaques peuvent aussi créer des troubles. Dans ces cas, la parole est faible, la voix devient inaudible, les personnes paraissent inexpressives.
La dysarthrie peut également être causée par une atteinte périphérique, c’est-à-dire touchant soit des muscles soit des nerfs qui permettent de parler. Les paralysies faciales sont les premières causes de ces atteintes périphériques. La moitié du visage est paralysée, depuis l’œil jusqu’à la joue et la moitié des lèvres. Par conséquent, il est difficile, voire impossible, d’articuler tous les sons du français puisque la joue ne fonctionne pas, les lèvres ne peuvent pas s’arrondir et parfois même la langue est difficile à contrôler.
Quel est le parcours de soins ?
Si la dysarthrie est le premier signe que la personne perçoit, il est important de consulter le médecin pour connaître la cause médicale de ces difficultés de parole. La première étape est de comprendre pourquoi la personne ne peut plus articuler comme à son habitude. Même si c’est le seul signe et que la difficulté à parler est venue d’un coup, il faut dans ce cas appeler le 15 pour s’assurer qu’il ne s’agit pas d’une urgence comme l’AVC, qui nécessite des soins le plus rapidement possible. Antoine a pu bénéficier très vite de soins spécialisés en unité neurovasculaire.
Dans les cas où la dysarthrie est identifiée dans le cadre d’une pathologie plus large, le parcours médical et de soins dépendra de la pathologie. Le médecin traitant saura vers quel spécialiste orienter la personne. Il s’agit le plus souvent d’un ORL ou d’un neurologue.
À quoi sert l’orthophonie ?
Une intervention orthophonique est souvent indiquée afin de permettre au patient de percevoir et de corriger ses difficultés au mieux grâce à des exercices spécifiques. L’objectif est d’améliorer et de faciliter la communication et de préserver ou de récupérer un caractère plus naturel à la parole.
Par exemple, l’orthophoniste propose des exercices pour mieux contrôler la respiration dans la parole, pour gagner en précision dans les mouvements de la face et de la gorge.
L’orthophoniste accompagne le patient et son entourage pour mieux comprendre ce qui se passe. Pour l’entourage, il est préférable de ne pas faire semblant d’avoir compris et de laisser du temps à la personne pour s’exprimer.
Les objectifs de la rééducation seront de savoir comment compenser et gagner en intelligibilité. Si le patient est d’accord et selon sa pathologie, des exercices de lecture à haute voix en exagérant l’articulation, de répétition en rythme de mots et de phrases de plus en plus complexes pourront être proposés. S’il le souhaite et si cela est possible, des exercices réguliers à faire seul (devant le miroir ou avec son entourage) pourront également être proposés, en complément des séances d’orthophonie.
Si besoin, l’orthophoniste pourra proposer de façon temporaire ou de façon prolongée l’utilisation d’un outil alternatif de communication, pour soulager et faciliter les échanges avec les interlocuteurs. Il pourra s’agir de mots ou de photos à montrer, d’une ardoise pour écrire des mots clés ou d’une synthèse vocale si les troubles sont plus définitifs.
Le patient dysarthrique ne mesure pas forcément toujours les changements qui affectent sa parole. Sa motivation pour la rééducation n’est pas toujours aussi forte que celle de l’entourage. Il est important d’échanger à ce sujet pour trouver la meilleure solution pour le bien-être du patient.
Dans certains cas, la dysarthrie diminue progressivement et les patients retrouvent une façon de parler qui leur est acceptable. Si la dysarthrie est associée à une maladie dégénérative, les séances d’orthophonie seront proposées plus longtemps.
Antoine a du mal à parler en raison de sa dysarthrie. Il a des difficultés à programmer et articuler les sons pour bien former les mots. Cela est très frustrant et bien souvent il s’énerve car il ne reconnaît ni sa voix ni sa façon de parler. L’orthophoniste l’aide à retrouver le contrôle de la parole, l’accompagne et informe son entourage. Antoine est très motivé pour retrouver une articulation claire. Cela va lui permettre de mieux se faire comprendre. Son entourage peut l’aider en se montrant patient et en encourageant ses efforts.