Comment fonctionne la voix ?
La voix est un instrument à vent. Nous avons deux cordes vocales, qui sont situées à l’horizontale au milieu du cou, en haut de la trachée, dans ce qu’on appelle le larynx. On peut les sentir vibrer lorsqu’on pose un doigt sur la pomme d’Adam et qu’on fait un « aaaa » un peu long. Lorsque l’on veut parler, l’air des poumons est expulsé ; il va remonter dans la trachée et rencontrer les cordes vocales qui vont se rapprocher et vibrer. Le son va ensuite être amplifié par toutes les cavités situées au-dessus du larynx comme la gorge, le nez (c’est ce qui explique que notre voix change quand on est enrhumé : nos résonateurs se sont temporairement modifiés). Les cordes vocales forment un V pendant la respiration, et se rapprochent lors de l’émission de la voix. Elles sont toutes petites (environ 10mm chez l’enfant de 10 ans, 12-17mm chez la femme et 17-23mm chez l’homme) et s’étirent et vibrent plus rapidement pour faire des sons aigus. Si leur bord n’est pas lisse, s’il y a une grosseur par exemple, la voix va devenir rauque, soufflée, manquer de puissance.
Et pour mon enfant ?
Chez l’enfant, il existe plusieurs types de lésions qui expliquent une voix rauque ; les deux principales sont les nodules (petites grosseurs sur les cordes vocales, consécutives à du forçage vocal régulier et prolongé) et les kystes intra-cordaux (épaisseurs à l’intérieur de la corde, gênant aussi la vibration). Les kystes chez l’enfant sont le plus souvent congénitaux, c’est-à-dire que l’enfant est né avec. Ils ne sont pas, dans ce cas, la conséquence d’une voix forcée mais au contraire ils poussent l’enfant à forcer : comme la vibration se fait difficilement, l’enfant va davantage pousser sur sa voix pour se faire entendre.
En pratique, qu’est ce que ça change ?
Il faut savoir que les cordes vocales d’un enfant sont souvent difficiles à voir précisément pendant l’examen ORL. Parfois, l ORL va parler de nodules a priori puisqu’il voit un ou deux épaississements de la corde, mais il pourrait cependant quelquefois s’agir d’une lésion à l’intérieur de la corde, donc plutôt un kyste. C’est probablement le cas si votre enfant a toujours eu la voix cassée (même dans la toute petite enfance) ou si d’autres membres de la famille ont ce petit grain de voix là. Quoi qu’il en soit, chez l’enfant la distinction kyste/nodule ne va pas changer la prise en charge immédiate. La seule chose à savoir en ce cas, c’est qu’un nodule peut totalement disparaître avec une rééducation orthophonique, alors qu’un kyste ne partira pas, on améliorera le geste et le confort de la voix avec la prise en charge orthophonique.
Que va –t-il se passer après le rendez-vous ORL ?
Si un kyste ou un nodule (ou deux mini-nodules se faisant face, qu’on appelle kissing nodules) est mis en évidence, l’ORL va proposer de faire un bilan et une rééducation orthophoniques. Cette rééducation devra être très courte, et il s’agit en général d’un suivi qui se pratique avec l’enfant et ses parents, sur quelques séances de guidance.
Que va faire l’orthophoniste durant le bilan et les séances ?
Durant le bilan, l’orthophoniste va poser beaucoup de questions sur l’utilisation de la voix au quotidien : à la maison, à l’école, durant les activités de loisirs, pour connaître le fonctionnement vocal de l’enfant et les situations à risques (on rencontre par exemple des enfants qui forcent leur voix en faisant des imitations). Il va évaluer la gêne de l’enfant mais aussi écouter les commentaires de la famille. Souvent les parents sont gênés par cette voix cassée, parfois l’enfant ne l’est pas. Il va aussi regarder le geste vocal de l’enfant : sa posture, la gestion de sa respiration, son articulation, et écouter (et enregistrer) la voix de l’enfant : sa hauteur (grave ou aiguë), son timbre (rauque, soufflé, voilé), son intensité (forte ou faible), et encore d’autres paramètres utiles pour la rééducation. À la suite de ce bilan, quelques séances vont être proposées, durant lesquelles l’orthophoniste va expliquer à l’enfant et lui faire ressentir comment fonctionne la voix, ce qui peut lui faire du bien ou au contraire l’abîmer, comment en prendre soin et comment elle peut évoluer. On va inviter l’enfant à être à l’écoute de ses sensations et on va proposer aux parents d’accompagner leur enfant dans cette démarche qui demande souvent la participation de toute la famille. Il est rarissime d’opérer ces petites lésions bénignes, d’autant qu’en grandissant le larynx va se transformer et la voix également.
Que dois-je faire au quotidien ?
Il est intéressant de se demander pourquoi l’enfant crie mais également où il crie.
Quelquefois la voix est cassée uniquement les jours d’école ou de match. Dans ce cas, on cherche à savoir pourquoi il crie. A-t-il du mal à se faire entendre en milieu bruyant (cantine, cour de récréation, stade de foot…), a-t-il du mal à se faire une place dans le groupe, et dans ce cas peut-être n’a-t-il trouvé que sa voix pour cela ?
Parfois, l’enfant parle fort ou crie aussi à la maison. On va alors s’interroger : l’ambiance est-elle bruyante ? Est-il le seul à crier ? Si ce n’est pas le cas, chacun va être invité à baisser le volume de sa voix. A-t-il du temps et de l’espace pour se faire entendre ou tout le monde parle-t-il en même temps ? A-t-il trouvé avec sa voix un moyen d’exprimer sa frustration, son sentiment d’injustice, faute de mieux ? Le cas échéant on peut réfléchir ensemble à un moyen plus adapté d’exprimer ses émotions. Il est important que l’enfant ait un espace d’expression adapté à ses besoins, faute de quoi il se fera bruyamment entendre, risquant ainsi d’endommager ses cordes vocales.
Quoi qu’il en soit, un enfant de 10 ans a besoin de bouger, de rire, de parler et même de crier. On ne va pas le lui interdire, on va lui permettre de « bien » le faire. C’est en cela que la rééducation orthophonique sera utile. Redonner à la voix un juste espace, en permettant un geste vocal équilibré.