Colette souffre d’un cancer situé à proximité de ses cordes vocales, au milieu du cou. Elle ne peut pas être opérée, elle a commencé un traitement par radiothérapie. Durant les rayons, elle a du mal à manger, on lui a donc posé un petit tuyau qui arrive directement dans son estomac, ce qui lui permet de continuer à se nourrir régulièrement : c’est une gastrostomie.
Qu’est-ce que la radiothérapie ?
La radiothérapie est un traitement médical qui consiste à envoyer des radiations (rayons) pour soigner une tumeur cancéreuse. Cela fait mourir les cellules cancéreuses et peut permettre de guérir le malade. Dans certains cancers, la radiothérapie est proposée en complément des autres traitements : chirurgie, chimiothérapie, immunothérapie. Parfois, le malade aura uniquement des rayons, parfois il sera opéré puis irradié, parfois il aura aussi de la chimiothérapie, c’est-à-dire des médicaments spécifiques contre le cancer. Le type de traitement se décide lors d’une réunion entre plusieurs médecins spécialistes.
Dans le cas des cancers de la zone ORL (nez, gorge, oreille), la radiothérapie se déroule généralement durant 5 à 7 semaines, à raison d’une séance par jour du lundi au vendredi. La séance est très rapide et le patient est suivi par toute l’équipe de radiothérapie. Avant de commencer les rayons, il passe un scanner qui permet de déterminer l’endroit exact où il faudra envoyer les radiations. On lui explique aussi les effets secondaires possibles et les précautions à prendre.
Pourquoi le malade a-t-il du mal à manger ?
Dans certains cancers de la gorge, la protection de la trachée est gênée par la tumeur elle-même. Le patient risque alors de faire des fausses routes (d’avaler de travers) ou alors il peut avoir du mal à déglutir, les aliments descendent difficilement. On peut tous avaler de travers un jour où l’autre, mais dans certaines tumeurs de la gorge, les fausses routes sont fréquentes et deviennent dangereuses.
Parfois, la tumeur ne gêne pas pour avaler mais les effets secondaires des traitements empêchent le malade de manger suffisamment par la bouche. Avaler peut être douloureux, les aliments peuvent passer du mauvais côté, le manque de salive peut gêner les repas, la mastication peut être difficile durant quelques semaines. Dans ce cas, une alimentation artificielle est la solution pour permettre de continuer à se nourrir.
Qu’appelle-t-on nutrition artificielle ?
Lorsqu’il est impossible de manger par la bouche durant une longue période, le malade peut être nourri par nutrition entérale. Cela veut dire que la nourriture est amenée directement vers son système digestif, par un petit tuyau appelé sonde.
On distingue 3 types de nutrition entérale :
- L’alimentation par sonde naso-gastrique : le tuyau passe par le nez et descend jusqu’à l’estomac
- L’alimentation par gastrostomie : un petit trou est fait au niveau de l’estomac au cours d’une intervention chirurgicale, le tuyau est donc raccordé directement à l’estomac
- L’alimentation par jéjunostomie : cette fois-ci le trou est placé au début de l’intestin, donc juste après l’estomac.
Dans ces trois cas, les aliments sont présentés sous forme d’un liquide un peu épais, qui passe par la sonde grâce à une pompe. Le patient a ainsi suffisamment de calories pour pouvoir vivre sa journée. L’alimentation entérale est faite soit le jour, soit la nuit.
Si l’alimentation entérale n’est pas possible, on peut envisager une nutrition parentérale : l’alimentation est administrée par une perfusion dans une veine. C’est un autre type de nutrition artificielle.
Doit-on garder une alimentation entérale toute la vie en cas de cancer de la gorge ?
En général, quand on pose une sonde naso-gastrique, c’est pour une durée limitée, le plus souvent quelques semaines. En effet, la sonde finit par être désagréable et elle est visible, ce qui peut gêner le patient dans ses interactions sociales.
Lorsqu’on sait que les traitements vont être longs, il est préférable de poser une sonde de gastrostomie. Cela se fait avec une courte anesthésie générale. La sonde de gastrostomie peut être gardée des mois, voire des années, elle nécessite des soins de nettoyage quotidiens qui peuvent être faits par le malade ou par un infirmier. Le but est évidemment de s’en passer un jour où l’autre.
Quelle que soit la sonde, l’objectif est de pouvoir un jour manger à nouveau par la bouche, ce qu’on appelle « per os » en langage médical. La plupart du temps, c’est possible, en étant accompagné par un orthophoniste, quand le médecin considère que c’est envisageable.
Pourquoi voir un orthophoniste lorsqu’on est nourri par sonde ?
L’orthophoniste est un professionnel de santé formé à dépister et à rééduquer les troubles liés aux fonctions oro-faciales (de la bouche et de la face). La déglutition fait partie de ses compétences. L’orthophoniste peut donc, en lien avec les médecins qui suivent le malade, accompagner vers une reprise de l’alimentation par la bouche. Evidemment, plus le patient continue à déglutir (y compris sa salive) durant les traitements, plus cela facilite sa reprise alimentaire car on considère qu’une fonction non utilisée se perd.
Que fait l’orthophoniste en cas de radiothérapie de la zone ORL ?
Sur prescription médicale, l’orthophoniste rencontre le patient et propose tout d’abord un entretien assez long. Pendant ce rendez-vous, l’orthophoniste va demander les habitudes de vie du patient, son parcours de soins depuis le début du cancer, et questionner sur ce qui est difficile actuellement : manger ? parler ? ouvrir la bouche ? sentir le goût ? avaler ? croquer ?
Il va aussi vérifier l’état de santé général du malade et se renseigner sur les autres traitements en cours, en s’aidant des comptes rendus médicaux que le patient apporte. L’orthophoniste demande précisément comment se nourrit le malade : totalement par la sonde ? en partie seulement ? avec quels aliments ?
Ensuite l’orthophoniste effectue un examen clinique de toutes les fonctions qui entrent en jeu dans la déglutition. En effet, manger demande des compétences variées, que ce soit au niveau du mouvement (de la langue, des lèvres, du voile du palais, du cou) ou de la sensibilité. Il faut aussi un bon état de vigilance, et le patient doit être capable de comprendre les consignes qu’on lui donne. Des essais alimentaires peuvent être réalisés lors du bilan afin d’évaluer les compétences en situation réelle.
En fonction de la plainte, des données recueillies lors de l’entretien et de l’examen clinique, l’orthophoniste va proposer un plan de soins, et demander des examens complémentaires si besoin.
Et après ?
Selon les éléments médicaux et l’évolution de la maladie, dans la plupart des cas une alimentation par la bouche est envisagée, que ce soit totalement ou partiellement. Grâce à des exercices ciblés et à des adaptations, l’orthophoniste accompagne le malade jusqu’au but fixé. Les rendez-vous sont parfois hebdomadaires, parfois plus espacés, en fonction du plan de soins défini lors du bilan. L’orthophoniste intervient toujours en lien avec les médecins qui suivent le patient : généraliste, spécialistes (ORL, stomatologue, cancérologue) et avec les autres professionnels de santé : kinésithérapeute, infirmier, diététicien qui s’occupe de gérer la nutrition entérale.
Le traitement des cancers de la zone ORL (nez, gorge, oreille) entraîne parfois des désagréments durant les repas et l’obligation d’être nourri temporairement par sonde. La reprise de l’alimentation par la bouche est généralement envisageable ; elle se fait auprès d’un orthophoniste. Le but est de permettre d’avoir un apport calorique suffisant, mais aussi et surtout de retrouver le plaisir de manger, tout en restant en sécurité.