Ecrans

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Les écrans sont partout, dans la rue et les lieux publics, dans les restaurants, les maisons, dans les sacs à main ou dans les poches : écrans d’informations, téléviseurs, ordinateurs, consoles, tablettes, téléphones mobiles. Pour nous les enfants, ils font partie du décor. On sait très vite s’en servir. Je me suis amusé(e) à compter combien il y en a dans la maison. Il peut y en avoir 2 ou 3 par personne !

Pareil pour le temps qu’on passe devant, les petits comme les grands. On ne se rend pas compte, c’est vraiment longtemps, de 30 minutes à plusieurs heures par jour !!! Matin, soir et temps libre : pour certains, ils y passent autant de temps qu’à l’école !

Y a plein de choses à y faire : Il y a les dessins animés ou les émissions pour enfants à la télé après l’école et pendant les vacances. Il y a les émissions ou les infos à la télé que la famille regarde en mangeant. La télé qui reste allumée même si personne n’est devant, en bruit de fond. Il y a les jeux vidéo sur les consoles ou les tablettes. Il y a les vidéos sur You Tube. Il y a les activités à partir de logiciels éducatifs sur les ordinateurs. Il y a Internet que l’on peut interroger quand on veut. Il y a les téléphones mobiles avec plein d’applications dessus. Et mon grand frère et mes parents, ils vont sur les réseaux sociaux. Bien sûr les écrans font partie de notre vie.

Les chercheurs se posent des questions et font des tas d’études. Les médecins s’inquiètent d’une ‘surexposition aux écrans’ des enfants et des parents. Ils s’inquiètent aussi du temps où on est ensemble mais chacun dans son coin. On ne se parle plus.

Trop d’écrans, trop longtemps : quels effets ?

Les yeux et la vision :

Les images bougent tout le temps et parfois très rapidement, il y a souvent des effets spéciaux et des flashes lumineux. Plus on est jeune (et même quand on est plus grand) ça abîme les yeux et le cerveau. Quand on est proche de l’écran, on utilise toujours la vision de près. On développe mal la vision sur une plus grande largeur ou la vision de loin, ou encore le passage de près à loin. Et puis, la lumière bleue émise par les écrans n’est pas bien filtrée par l’œil. Elle retarde l’endormissement.

L’attention :

Un écran capte l’attention au détriment de ce qui se passe dans l’environnement. Ca va très vite, ça change, ça bouge, y a pas de pauses. Les images nous fascinent. Le cerveau se met en sur-régime et on se sent trop bien. Mais quand ça s’arrête, on est en manque et on ne se sent pas bien. On le montre par l’énervement, les bouderies ou la fâcherie. On ne sait plus rien faire, on s’ennuie sans écrans. On n’a plus d’imagination pour jouer. Alors que des moments de pause sont nécessaires. L’ennui est très important pour se reposer le cerveau, reconstituer son énergie, rêver éveillé et développer son imaginaire. On ne sait plus comment soutenir son attention et se concentrer. Alors on zappe d’une information à une autre, d’un jeu à un autre… Si on passe trop de temps devant quand on est très jeune, après on ne sait plus être attentif à ce qui est important. On ne sait plus comment soutenir son attention et se concentrer. Et ce qu’on nous propose, surtout en classe, est moins coloré, moins dynamique, moins captivant, alors on a du mal à s’y intéresser et à apprendre.

Les relations aux autres:

Quand on est devant un écran, on est tout seul. On risque de se couper des autres et de ce qui se passe à côté de nous. Et ce qui se passe sur un écran ne nous apprend pas les codes sociaux : c’est-à-dire le vivre ensemble, les règles de la vie en famille, en groupe, à l’école… On a besoin de relations avec des vrais gens pour échanger et comprendre les autres et le monde, pour s’entraider. Les amis sur les réseaux sociaux ne sont pas des amis en réalité, on ne peut pas leur demander un service, leur confier un secret. Y a même des enfants qui se font harceler ou influencer par des gens dangereux. Et certains adultes qui sont très souvent occupés sur leur téléphone mobile, ils passent moins de temps avec les enfants pour leur parler, leur dire le nom des choses, leur expliquer ce qui se passe, prendre du plaisir à échanger. Alors il peut y avoir des enfants qui se replient sur eux-mêmes, ne regardent plus franchement les gens, communiquent peu et ne développent pas ou mal le langage. Le smartphone de papa ou de maman n’est ni une baby-sitter, ni un doudou.

Les émotions :

Il y a aussi le contenu des films ou de jeux vidéo. Certaines images sont violentes, ça fait peur. Les images destinées à des adultes, ça me choque. Le contrôle parental est essentiel quand on partage les écrans. Je ne sais pas dire aux adultes qu’une image m’a perturbée. Papa ou maman me demande souvent ce que j’ai regardé et qu’on en parle ensemble. Ce qui se passe, ce n’est pas la vraie vie. C’est souvent sans nuances : très moche ou hyper fun, un horrible méchant et un super gentil, un super-héros, des pouvoirs extraordinaires : les événements et les réactions des héros, cela suscite en moi une avalanche d’émotions qui ne sont pas canalisées, ni expliquées. J’ai alors du mal à me construire de façon équilibrée.

La santé:

Il y a toutes les publicités, avant, pendant après les vidéos ou les dessins animés, souvent pour des aliments trop salés, trop sucrés ou pour des jouets trop sophistiqués. Cela me conditionne sans que je m’en rende compte. J’ai soudain envie de manger des bonbons, des biscuits salés ou de boire du soda. Le temps devant l’écran, c’est moins de temps pour aller courir, sauter, grimper, prendre l’air. Quand on bouge peu et qu’on mange mal : on peut prendre du poids : c’est un vrai problème.

Le développement psychomoteur :

Quand on est devant un écran trop jeune et trop longtemps, on ne fait pas ou peu d’expériences motrices. On ne développe pas son agilité, son adresse et les habiletés de la main. Tout cela, pourtant, on en a besoin pour faire des expériences et apprendre à agir et penser. Par exemple, sur un écran pour ouvrir une boite, un coffre, une porte, quel que soit ce qu’il y a à ouvrir, on clique sur l’image ou on tapote sur l’écran tactile et on fait glisser le doigt. Alors que dans la vraie vie, il y a des tas d’actions différentes, des adaptations à trouver à la forme et au poids des objets. Il faut tirer vers soi, soulever vers le haut, dévisser, attraper une languette entre le pouce et l’index. C’est bien plus riche et formateur que cliquer, tapoter, faire glisser le doigt…

Avec les manipulations à faire dans les jeux, on devient hyper spécialiste du repérage visuel dans un rectangle (celui de l’écran) ou hyper rapide pour cliquer sur les bonus, mais qu’est ce qu’on en fait dans la vie de tous les jours ?

Le langage :

Il y a des adultes qui sont très souvent occupés sur leur téléphone mobile, ils passent moins de temps avec les enfants pour leur parler, leur dire le nom des choses, leur expliquer ce qui se passe, prendre du plaisir à échanger. Alors il peut y avoir des enfants qui se replient sur eux-mêmes, ne regardent plus franchement les gens, communiquent peu et ne développent pas ou mal le langage.

Et une émission de télé, un jeu vidéo, une activité éducative sur une tablette, où c’est pareil pour tout le monde, ça ne m’apprend pas à parler. Cela peut même me retarder dans le développement de la parole et du langage si je n’ai pas d’autres modèles. Parce que pour développer le langage, il faut être avec une vraie personne avec qui on est complice. Qui prend du temps et s’intéresse à moi. Qui me regarde dans les yeux. Qui s’adapte à moi, connait mes intérêts, mes points forts et mes points faibles. Qui m’encourage dans mes essais et me soutient si c’est un peu compliqué. Qui reprend ce que je dis et le reformule à mon niveau. Qui me félicite.

Les jeux :

Quand je joue à un jeu d’aventure, sur une tablette ou une console, l’histoire, je n’ai pas à l’inventer. Le créateur du jeu, il a décidé de ce qui va se passer. Il me laisse juste choisir l’ordre dans lequel cela va se faire. Je n’ai pas besoin de chercher ou d’imaginer ce dont j’ai besoin pour faire avancer l’histoire. Il me laisse juste choisir parmi des choses qu’il a décidées lui. Cela ne développe pas mon imagination ni ma créativité ! Et puis il y a tous ces jeux où on tire sur tout ce qui bouge, c’est pas très constructif…

Les enseignants, les orthophonistes et d’autres professionnels de la rééducation, les psychologues … accueillent des enfants qui rencontrent des difficultés d’apprentissage du langage, de la lecture, du calcul, qui ont des problèmes de comportement ou d’entrée en relation. Et de plus en plus quand ils posent la question, ils découvrent des longs moments devant les écrans et de plus en plus tôt dans la vie. Alors il faut réagir.

La dernière fois que mes parents m’ont emmené(e) chez le médecin, il leur a proposé de remplir un questionnaire pour savoir combien d’écrans il y avait à la maison, combien de temps je passe devant, à quel moment de la journée et qu’est-ce que j’y fais.

Et puis le médecin leur a donné des tas d’explications et de conseils. J’ai bien écouté. Voilà ce que j’ai retenu

  • Jamais d’écran avant 3 ans.
  • Moins de 30 minutes par jour avant 6 ans.
  • Des temps bien définis et limités pour tous.
  • Proposer des plages de temps sans écran et équilibrer les temps connectés et les temps déconnectés.
  • Pas d’écran dans ma chambre et des pièces de la maison sans écran.
  • Pas le matin au réveil et avant l’école,
  • Jamais pendant les temps de repas et avant de se coucher,
  • Pas pendant les trajets en poussette ou dans la voiture (un peu seulement pendant les longs trajets longs).
  • Préférer les médias qui permettent des activités partagées ou créatives.
  • Contrôler ou limiter les accès libres,
  • Tenir compte des recommandations du CSA.
  • Mettre un contrôle parental
  • Mes parents doivent me donner le bon exemple et me rappeler les règles de bonne conduite…

Pendant les moments devant les écrans (pas trop nombreux et pas trop longs), moi, je trouve ça bien quand un parent ou un adulte regarde une vidéo ou une émission avec moi, joue avec moi à un jeu vidéo de coopération. J’ai besoin qu’il partage et parle avec moi de ce que j’ai fait et vu.

Et puis il y a plein d’autres choses à faire en dehors des écrans. D’ailleurs les parents sont bien plus compétents que tout ce que peuvent apporter les écrans. On apprend et partage plein de choses indispensables et inimitables pendant une promenade en famille, un jeu de ballon avec les frères et sœurs ou les copains. Quand on joue à faire semblant d’être la maîtresse ou de jouer au papa et à la maman avec les doudous. Quand on fait une recette de crêpes avec papa, un dessin pour la voisine, un jeu de loto ou de cartes avec les grands parents, du bricolage avec ma soeur. Quand on se parle et qu’on raconte sa journée, on écoute une histoire, on chante et mime une comptine, on regarde un livre, on fait un câlin …