Anton, 3 ans tout juste, a commencé à bégayer. Lui qui était très bavard à la maison, il ne dit plus que des phrases de deux ou trois mots. Il semble aussi plus triste. Il va moins vers les autres au parc. Ses parents se demandent si sa timidité avec les personnes inconnues pourrait avoir déclenché son bégaiement. Cette impression est renforcée par les remarques de la maîtresse d’Anton et des grands-parents, qui disent que le bégaiement est lié à la timidité et au stress.

Les infos sur le bégaiement

Les causes du bégaiement ne sont pas toutes connues. L’opinion des chercheurs penche maintenant vers l’association de plusieurs facteurs. Ce serait comme une soupe avec de nombreux ingrédients. Dans les ingrédients de base, on retrouve la génétique. Les enfants qui bégaient ont souvent des membres de leur famille qui bégaient ou ont bégayé. Mais ce trait génétique ne suffit pas à lui tout seul. Les études sur le cerveau des personnes qui bégaient ont aussi montré des formes inhabituelles de certaines zones du cerveau et une circulation différente de l’information. Mais on ne sait pas si le bégaiement a modifié le cerveau ou si les modifications ont créé le bégaiement.

Combien de temps ça va durer ?

De nombreux enfants qui commencent à bégayer vont s’arrêter tout seuls. Cela peut prendre de 6 à 36 mois. Quand un enfant bégaie, on veut savoir ce qui fait que ce bégaiement continue au lieu de s’arrêter. Les ingrédients qui feraient durer le bégaiement pourraient être :

  • Le déclenchement après 3 ans et demi
  • Le fait d’être un garçon (pourtant, au début du bégaiement, on trouve autant de filles que de garçons)
  • Le tempérament de l’enfant

Il est important de préciser que le “tempérament” n’est pas le caractère de l’enfant. C’est plutôt sa tendance à être curieux ou apeuré face à la nouveauté, à rester « excité » longtemps ou à revenir rapidement à un état de calme.
Les enfants qui bégaient peuvent montrer plus de signes d’agacement et de colère que les autres enfants. Ils ont aussi tendance à se précipiter face à une information nouvelle. Ils ont plus de mal à se retenir d’agir si l’information change brusquement.
Une recherche récente en France montre que statistiquement, les enfants qui bégaient auraient des particularités dans l’analyse des informations de leurs sens (la vue, le toucher, l’ouïe, le goût, l’équilibre). Ils seraient plus sensibles et réactifs face à des sons ou des informations provenant de plusieurs sens en même temps.

Comment comprendre ce qui fait bégayer mon enfant ?

Un modèle intéressant pour mieux comprendre la part de tous ces ingrédients est celui des « capacités-demandes ». Le système de parole n’arrive pas à fonctionner parce qu’il y a une différence entre ses capacités et les « demandes » (le modèle autour de l’enfant) L’enfant qui apprend à parler construit tout son système musculaire pour dire ce qu’il a dans la tête. Le fait de vouloir « bien parler » ou d’essayer de parler aussi vite que ses parents peut mettre le système de parole en tension. Cela entraînerait les répétitions de syllabes et de mots. La réaction de l’enfant à ces « bugs » contribuerait ensuite à installer le bégaiement : l’enfant lutte (force sur les mots) ou évite (arrête de parler). On peut penser que Anton réagit très fort à ces moments de bégaiement. Ses émotions ne créent pas le bégaiement mais cela pourrait le faire durer. Il est important de préciser que les recherches n’ont pas montré de lien entre la timidité et le bégaiement. Parmi les enfants qui bégaient, on retrouve toutes sortes de caractères et de tempéraments.

Quand consulter un orthophoniste ?

C’est normal et très fréquent d’avoir des moments de bégaiement. Mais à partir du moment où Anton est frustré de son bégaiement et qu’il a changé son comportement : il faut consulter un orthophoniste. L’idéal est de ne pas attendre de voir si “ça passera”, surtout si ses parents sont inquiets.
Lors du traitement, l’orthophoniste commence par évaluer précisément l’ensemble des facteurs (les ingrédients) pouvant contribuer au bégaiement. L’orthophoniste cherche à savoir si Anton reste longtemps inquiet, stressé, excité ou anxieux après un événement qui le surprend.
Si le tempérament ou les réactions émotionnelles d’Anton entretiennent le bégaiement, la prise en soins orthophoniques s’adapte.

Que fait-on pendant les séances d’orthophonie ?

Lors des séances, on parle du bégaiement ouvertement, avec des mots simples et précis. Cela désensibilise l’enfant et ses parents. L’orthophoniste se sert de jeux pour intéresser Anton et le motiver. Les séances se font avec les parents et on recherche avant tout le plaisir dans la communication. Au quotidien, Anton doit être rassuré sur le fait qu’on le comprend et que ses émotions sont acceptées. Ses parents et l’orthophoniste vont chercher ensemble comment encourager la confiance en soi d’Anton. C’est un vrai travail d’équipe!

L’orthophoniste peut, par exemple, voir avec les parents comment ils parlent de leurs propres émotions. Ils peuvent expliquer à Anton comment ils font pour gérer leurs émotions et ce qu’ils ont appris pour revenir au calme. Par imitation, Anton apprend comment réagir à ses émotions. Il a compris que le bégaiement ne l’empêche pas de jouer avec ses copains ou de parler à sa maîtresse. C’est important de garder à l’esprit que la gravité d’un bégaiement n’est pas ce qu’on entend mais son impact sur la vie de l’enfant et de ses parents.

La prise en soins orthophoniques permettra à Anton d’être à l’aise dans la communication, confiant, compétent et joyeux d’échanger. Même si on entend encore du bégaiement dans sa parole de temps en temps, le plus important est que Anton puisse dire tout ce qu’il veut, à qui il veut et quand il veut.